Visite d’un laboratoire hors norme, GLIDEWELL LABORATORIES

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IL ÉTAIT UNE FOIS… UN SI GRAND PAYS, UNE SI GRANDE VILLE…

La Californie c’est aussi des étoiles, les stars d’Hollywood à Los Angeles, la ville des Anges… Ses plages, ses surfeuses, Malibu, Venice… sans oublier Newport Beach. C’est d’ailleurs ici, à Newport Beach, à quelques pas des plages et tout proche de l’aéroport John Wayne, dans la région du Grand Los Angeles avec ses 19 000 000 d’habitants, que nous avons eu la chance de rencontrer une équipe de professionnels, de visiter et de découvrir, en toute simplicité, leur outil de travail : un laboratoire de prothèse dentaire américain pas vraiment comme les autres !

GLIDEWELL LABORATORIES,
Bienvenue dans un laboratoire XXL

Alors nous, les petits français, nous avons voulu comprendre le pourquoi du comment ! Quand un confrère de cette envergure vous ouvre ses portes et vous dévoile une partie de son travail, de son expérience, de sa technique, il est évident que nous ne nous sommes pas fait prier pour observer ce laboratoire hors norme.

UN PEU D'HISTOIRE...
Après son service militaire en Asie du Sud-Est, Jim Glidewell suit un programme d’études de deux ans en technologie dentaire à l’Orange Coast College et obtient son diplôme en 1969.

Il ouvre les portes de son premier laboratoire l’année d’après, en 1970 à Palm Street. C’est en 1993 qu’il déménage dans les locaux qu’il occupe actuellement à Irvine (Newport Beach).

En quelques années, le laboratoire emploi près de 100 personnes, mais c’est la croissance externe qui lui aura permis d’augmenter rapidement l’effectif de ses équipes, avec l’acquisition d’autres laboratoires atteignant la taille de 300 personnes.

Ce ne fut que la première étape ! Le marché américain n’est pas celui de la France : les charges sociales mais surtout le mode libéral permet à Glidewell, beaucoup plus de souplesse pour embaucher mais aussi pour licencier rapidement. Même si la croissance le permet, les risques de prud’homme sont ici eux aussi, bien réels, mais malgré cela et avec une bonne gestion de son personnel, l’entreprise continue de se développer et atteint 1 000 salariés.

Ce n’est qu’en 2006 que la progression spectaculaire de Glidewell prend le virage des nouvelles technologies. C’est alors un apport considérable qui révolutionne totalement la production de ce leader du marché américain. L’arrivée des imprimantes 3D et des logiciels de modélisation bouscule la chaine de valeur, accélère la production, diminue les risques et augmente les rendements.

Aujourd’hui, ce sont 4 300 employés au total, dont 3 000 sur le seul site de Newport Beach, qui sont répartis sur les 12 bâtiments de l’entreprise.

Au premier regard, c’est un accueil chaleureux qui nous est réservé. Ici pas de tabou sur les prix, sur les chiffres d’affaire, les progressions, les avantages des salariés, comme si nous discutions entre confrères français tout simplement… Une réalité économique évidente où rien n’est laissé au hasard.
Et c’est une véritable machine que nous découvrons : sur le site certains bâtiments dépassent les 15 000 m2… C’est impressionnant d’y trouver des salles de repos et plusieurs restaurants. Il faut bien cela quand 3 000 personnes passent à table !
Tout est conçu pour le bien-être des salariés et cela se sent dans l’atmosphère. Ici, les employés bénéficient d’une mutuelle, de la sécurité sociale… Et des rémunérations de 500 à 800 $ par semaine, 10 jours de congés annuels et pour les congés maladie : 6 jours payés par an mais ensuite… plus rien ! C’est aussi ça les Etats-Unis !

Le laboratoire est ouvert 7J/7J et 24H/24H, pour palier aux différents fuseaux horaires du pays et éviter de perdre des jours de production. Et pour éviter des ruptures de production par manque d’approvisionnement, des distributeurs de fournitures automatiques sont disposés aux étages, à coté de ceux des boissons gazeuses ou autre popcorn !

Ce mode de fonctionnement et d’organisation permettent de générer des chiffres impressionnants !

PLUS DE 3 000 IMPLANTS / JOUR
100 000 FULL ZIRCONE BRUXZIR / MOIS

Chaque soir, Fedex affrète un avion cargo, uniquement pour le laboratoire, qui part de l’aéroport de Newport Beach pour Minneapolis. Arrivé au Hub de Fedex, les boites seront dispatchées en direction des 75 000 clients du laboratoire… Oui, vous avez bien lu ! 1/3 des chirurgiens-dentistes aux Etats-Unis sont clients du laboratoire Glidewell.

Glidewell a toujours voulu démocratiser la prothèse dentaire et pour se faire, il a toujours cherché des systèmes de production innovants pour réduire ses coûts, valoriser ses marges et offrir ainsi un produit made in USA de qualité à prix réduit et dont le seul objectif final est la satisfaction du patient.

Est-ce un bien ou un mal , je ne suis pas là pour juger, ni pour critiquer l’esthétique des prothèses mais juste pour me faire une idée et constater la réalité. Ne l’oublions, pas aux Etats-Unis, parler d’argent n’est pas tabou.

Alors si cette philosophie peut créer du cash et améliorer la qualité de vie de tous, tout le monde ici en est ravi.
Jim Glidewell veut proposer des produits de qualité au meilleur prix afin de garantir de bonnes prestations aux clients. Cet objectif s’articule autour d’une volonté d’accessibilité à la santé : chacun peut et doit bénéficier de bons soins dentaires.

Toujours dans cette dynamique, Glidewell souhaite subvenir aux attentes des patients, de la meilleure manière possible avec l’optimisation des coûts et la garantie de qualité. Mais attention, on parle ici de qualité de matériaux, les critères esthétiques sont eux propre aux USA.

Le laboratoire réduit ainsi ses coûts en décidant de développer ses propres matériaux et outils : zircone, disilicate, machine outil, système implantaire, moteur de chirurgie… Et oui, le laboratoire a sa propre fabrication et marque d’implants. C’est en développant ses propres produits et matières premières en interne, que le laboratoire peut y arriver. D’importants financements sont consacrés à la Recherche et au Développement, avec pour seul but : entreprendre et innover. C’est parce que ces produits répondent d’abord aux besoins du laboratoire Glidewell, qu’ils sont aussi intéressants pour les autres laboratoires ayant des besoins similaires. Avant d’être commercialisés, ils sont testés des centaines de fois au sein du laboratoire de recherche.

Aujourd’hui, Henry Schein distribue même ces produits dans le monde entier, au même titre qu’un autre fabricant. En terme de chiffre, cela représente 7% du CA de l’entreprise.

Le laboratoire, en raison de son importance, a aussi un service menuiserie pour fabriquer une partie du mobilier, un véritable SAV à domicile, pour réparer machines et micros moteurs. Un service marketing, appuyé par une imprimerie qui édite les flyers et autres prospectus du laboratoire. Évidement une hotline… et le “Glidewell direct” : un service en ligne pour vendre les produits manufacturés du
laboratoire.

Un centre de formation est également présent en interne depuis de nombreuses années. Par son intermédiaire et grâce à la revue qu’il édite, Glidewell partage son expérience avec ses confrères américains, ce qui est profitable à tous.

MÉCANISATION

Voilà ce qui nous impressionne le plus ici : les chargeurs sont de rigueur, un opérateur arrive à gérer jusqu’à 4 machines : productivité maximum assurée quand en plus, la machine gère plusieurs blocs grâce à un automate !
Les serveurs informatiques, sont eux aussi hallucinants… Imaginez la modélisation d’un bridge full arch sans que le logiciel ne rame !!! Cela m’a interpellé… Comment font-ils pour avoir une telle rapidité de calcul alors que chez nous, nos ordinateurs moulinent ou plantent carrément ?
Le laboratoire a-t-il des cartes mères ou des logiciels boostés à l’adrénaline uniquement pour eux ? Un industriel comme 3shape, a-t-il développé un serveur d’une autre dimension exclusivement pour lui ?

CHAIRSIDE

C’est le chairside qui a soulevé le plus d’interrogations. Ici, on ne combat pas le chairside, on l’utilise. En effet, le laboratoire propose certes à ses clients des systèmes clés en main avec la fourniture, vente de machine d’usinage et de camera, mais il propose aussi la modélisation à distance des prothèses ou bien, via le Connect, la réalisation des prothèses grâce à l’empreinte numérique, avec ou sans modèle.

Glidewell utilise toutes les cordes du chairside pour en faire son allié. Il propose un prix pour la modélisation, (en effet il est capable de renvoyer du stl ou pas, le fichier modélisé par le laboratoire sur n’importe quel type de machine utilisée par le dentiste), un prix pour la réalisation avec le modèle et un autre sans le modèle.

NOUS NOUS EFFORÇONS DE RÉDUIRE LES COUTS DE RESTAURATION ET D’ÉLARGIR L’ACCÈS DES PATIENTS À UNE DENTISTERIE ABORDABLE.Jim Glidewell

Tout sera fait en fonction des attentes du chirurgien-dentiste et de son cas prothétique. Pour que le laboratoire puisse vendre sa prestation, le client est roi.

Dans un pays où tout le monde a son avocat attitré, les fiches sont clairement détaillées. Elles comprennent bien sûr, le descriptif du dispositif médical, mais aussi les conditions générales de vente, les tailles à respecter par le praticien en fonction du matériau, le délais de fabrication, les modes de règlement… Rien n’est laissé au hasard !

De toutes ses activités, c’est malgré tout la production de DMSM qui représente la principale ressource du laboratoire et génère un chiffre d’affaire annuel de 570 000 000 $US HT. Oui ici, les prix sont hors taxes ! On récupère la TVA sur les investissements.

De part sa taille, ce laboratoire ressemble-t-il à ce que l’on peut voir de l’autre côté du Pacifique et de ces images de travail à la chaîne ?

Non, ici on sectorise . Chaque unité de production est autonome. Ainsi, on ne parle pas de chaines de fabrication mais plutôt de spécification, comme dans un laboratoire de 6 ou 7 personnes.

Chacun a sa spécificité en rapport avec ses capacités, le plâtrier ne fait pas de céramique, les adjointistes ne sont pas à la modélisation ni au scannage des full-arch.

L’organisation et la rigueur sont primordiales, 4 200 appels téléphoniques arrivent chaque jour et en règle général, la réactivité est de mise avec un délai de 7 secondes en moyenne pour que le responsable du cas de la prothèse réponde au client.

Dans cette organisation, la traçabilité de la production est omniprésente. A chaque poste, des “douchettes”tracent les codes barres des boites. Ainsi, rien ne se perd et à l’instant T, un opérateur est capable de savoir à quel étage, à quel poste, dans quel bâtiment et à quel stade, se trouve la prothèse pour ainsi intervenir directement.

Et au milieu de cette “ruche”, le calme règne. Tout semble paisible, à moins que ce ne soit à cause de la rationalisation des tâches : trouver des solutions simples et efficaces pour rendre le travail plus rapide et plus facile aux prothésistes salariés.

Les chiffres parlent d’eux même. Nous sommes à 130 000 $ de production par an par salarié. Quand en plus, les taxes sur la masse salariale et les impôts sont moindres, il va de soi que le résultat est plus que bénéficiaire. Des bénéfices qui permettent au laboratoire d’investir dans des outils de production mais aussi d’acheter…

Un petit yacht de 40 mètres ou bien encore les deux avions de l’entreprise qui, lorsqu’ils ne sont utilisés par le laboratoire, sont loués et génèrent eux aussi, leur petit chiffre d’affaire d’environ 15 millions de dollars, une bagatelle…

Du côté du personnel, on ne peut pas cacher l’enthousiasme des quelques 3 000 salariés du site si facilement, il suffit de voir le parking et le parc automobile, de discuter avec eux en tête à tête, pour comprendre qu’ils sont satisfaits et heureux de travailler dans de telles conditions, fiers de la réussite de leur patron.

Au hasard d’un couloir, nous avons rencontré un employé français. Arrivé depuis 6 mois chez Glidewell, il nous a confirmé cet enthousiasme. Pour lui, le seul soucis pour l’instant c’est le logement et les transports bien différents de sa ville d’origine : Lyon. Mais il ne regrette en rien cette nouvelle page de sa vie pour l’instant.

L’embauche pour lui, s’était faite sans peine le lundi. Il avait entendu dire que l’entreprise embauchait 25 personnes chaque lundi (et c’est toujours le cas d’ailleurs). Il a donc passé des tests (de mathématiques… et oui on cherche des “matheux” !) mais attention, on ne garde que les meilleurs, ce qui fait que le vendredi d’après, 23 d’entre eux sont tout simplement débarqués.

Les personnes embauchées sont souvent sans formation, mais cela ne pose aucun problème… Ils seront formés en interne par des managers.
Sur des tableaux sont notées leurs progressions, leurs préférences de travail et ainsi ils seront orientés vers les fonctions les plus appropriées, pour leur biens mais aussi dans l’intérêt de rendre l’entreprise plus efficace.
Il est évident qu’à force d‘écrémer le personnel, seuls les meilleurs sont préservés dans l’entreprise. Avec les avantages sociaux et le salaire du laboratoire, les employés ici veulent garder leur poste.

EN CONCLUSION
Bien sûr Glidewell est un des plus importants laboratoires au monde. Une rigueur, une expertise, les vidéos que nous avons postées et que vous pourrez retrouver sur le blog de la revue PDF Actualités, en ont surpris plus d’un.

C’est une réalité, différente de la nôtre certes mais comme dans tout stage, il y a à apprendre et à comprendre, il y a des pratiques à appliquer dans nos entreprises même si le marché de la prothèse outre-atlantique est totalement différent.

C’est une expérience riche, aussi riche qu’un stage avec M. Nondas qui rationalise son montage de poudre céramique en une cuisson pour un résultat optimal.

Depuis des années, je prends le temps de sortir de mon laboratoire pour apprendre, rencontrer des gens, des fabricants, aller dans des congrès, dans des expositions, voyager en Europe et ailleurs dans le monde…

Partout, malgré les spécificités de chacun, nous parlons tous le même langage et avons les mêmes problématiques, nous rencontrons les mêmes mécanismes dans nos activités.

Alors, avoir une telle expérience est enrichissant et la partager est primordial. C’est aussi la philosophie qui rayonne de cette entreprise : partager son expérience.

Car avant tout Jim GLIDEWELL est un Prothésiste dentaire, propriétaire de son laboratoire, comme vous, comme moi, tout simplement, mais en version XXL, c’est aussi ça les USA !

Michel BASTIDE
Directeur de la Publication
Prothésiste dentaire – Maitre Artisan

Last modified: 10 octobre 2018