L’UNPPD et le Comident ont interpelé dans une lettre le Ministre de la santé Olivier Véran sur la problématique du cobalt.
Norbert Nabet a pris connaissance de cette problématique du cobalt à la lecture de notre courrier. L’objet de ce rendez-vous était donc de lui exposer l’intégralité du sujet.
Il lui a ainsi été précisé que chaque année, la profession utilise 37 tonnes de Chrome-Cobalt pour la fabrication de prothèses dentaires, cela étant considérablement amplifié avec la mise en place du 100 % santé et du panier RAC 0.
A court terme, il y a plusieurs questions qui se posent et qui lui ont été exposées :
> Les laboratoires pourront-ils encore se procurer des alliages de CrCo au-delà de 2024 ?
En effet, il se pourrait qu’il soit difficile pour cet alliage d’obtenir le marquage CE par un organisme notifié, une fois passée l’expiration des certificats CE. Et ceci va commencer dès mai 2022 pour les certificats obtenus en 2017. Début de réponse l’année prochaine donc.
> Pour la prothèse fixe, il y a des alternatives possibles comme :
L’alliage de titane, mais d’un point de vue économique, cela va demander de nouveaux investissements pour les laboratoires. En effet, à l’heure actuelle les laboratoires ne sont pas équipés et ils n’ont pas les moyens de pouvoir produire autant de prothèses avec ce matériaux.
Pour produire les 37 tonnes évoquées plus haut, en partant du principe que la technologie d’impression 3D par fusion laser métal soit le matériel alternatif à la fonderie pour garantir un tarif équivalent au CrCo, il faudrait 1 600 imprimantes de fusion laser implantées en France. Pour exemple, une fronde (technique traditionnelle) coûte autour de 7 000 à 15 000 euros, alors que pour une machine de fusion laser, le prix varie selon sa capacité de production entre 120 000 euros et 350 000 euros.
Au vue de la taille des laboratoires, ces investissements ne sont pas possibles sur du court terme pour la majorité de nos entreprises.
Cependant il reste une alternative de choix : la zircone mais cette dernière n’est pas incluse en totalité dans le panier de soin sur le reste à charge 0.
Ce matériau séduit d’année en année la profession par son amélioration esthétique et ses caractéristiques mécaniques.
> Par contre pour la prothèse amovible, la question d’une alternative possible avec au moins les mêmes propriétés de mise en œuvre se pose réellement.
Des plaques en polymère (le peek) sont en voie de développement mais il n’y a pas de recul clinique à ce jour. Le CrCo resterait ainsi pour le moment la meilleure alternative pour cette catégorie de prothèse dentaire.
> Par ailleurs, si nous en venons à ne plus pouvoir faire de prothèses dentaires avec du cobalt au profit du titane par exemple, il va se poser un problème pour les patients qui ont déjà des prothèses en CrCo en bouche et qui dans le futur, vont s’en faire poser de nouvelles. En effet la présence de deux alliages différents (titane + CrCo) en bouche peut entrainer la création d’un risque de potentiel électrique qui accélère l’hydrolyse soit du titane soit de l’alliage. Démonter une prothèse en CrCo pour la remplacer par un autre alliage est aussi mauvais pour la bouche.
> Il existe une vraie incohérence entre la convention dentaire qui, de son côté encourage l’utilisation du cobalt (au 1er janvier 2022, le 100% santé prendra en charge les châssis métallique fabriqués en CrCo ) et la réglementation européenne qui tend à l’interdire.
Cela met en porte à faux les laboratoires vis-à-vis de cette nouvelle réglementation.
DU CÔTÉ DU MINISTÈRE
Pour Norbert Nabet on est dans une logique où il va devoir falloir sortir du cobalt.
Le justificatif, alternative à l’interdiction prévue par le règlement européen 2017/745, va peut-être permettre de rester sur nos alliages mais seulement pendant un certain temps.
Le ministère a la capacité à déroger, le temps que tout cela se mette en place. En effet si jamais il faut accompagner une transition, il nous fait savoir qu’un délai sera alors possible.
Le message fort du gouvernement passera par des modifications de cette convention dentaire et du 100% santé.
LES ENJEUX A VENIR
De ce rendez-vous il en ressort que tous les acteurs de la filière, chirurgiens-dentistes compris, doivent être associés pour monter un groupe de travail et se mobiliser à ce sujet.
Il peut y avoir une stratégie à reculer la transition le plus longtemps mais elle arrivera .
La profession doit donc avoir en tête que pour la fixe, on tend vers la fin de la prothèse métallique à moyen terme.
En effet on constate depuis quelques années une accélération de nouveaux matériaux dans vos pratiques tant par la diversité que par la quantité. En premier lieu la zircone comme évoquée plus haut mais également le disilicate de lithium, les composites chargés les fibres de verre, les peek, pekk, etc.
Le changement va ainsi se faire sur un cycle plus ou moins long mais le Comident a fait passer le message qu’il fallait donner des moyens de recherche aux industriels.
Les 4 phases seraient ainsi : recherche, dérogation, prévention et formation.
L’UNPPD
De son côté, l’UNPPD lors de cet entretien a pu passer les messages suivants :
Il est urgent de revoir les termes de la Convention dentaire concernant les dispositifs contenant du Cobalt. Les prothésistes dentaires et les fabricants – distributeurs ne sont pas associés aux négociations de la Convention, mais ils pourraient être consultés dans le cadre de commissions techniques sur le choix des matériaux.
Du fait des problématiques soulevées, l’UNPPD confirme la nécessité d’obtenir un délai pour pouvoir s’organiser sur les prothèses fixes et, pour les prothèses amovibles, trouver une substitution garantissant des performances techniques au moins équivalentes.
Un prochain rendez-vous aura lieu prochainement avec les autorités compétentes afin d’avancer sur ce sujet qui préoccupe toute la filière dentaire, l’UNPPD est enfin entendue et consultée.
Last modified: 16 septembre 2021